Les périls de la vie, Sylvie Doizelet, Jean-Claude Pirotte

20062010

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Une visite guidée dans Londres, de péril en péril… Visite insolite…   

Sylvie Doizelet a photographié ces panneaux que nous connaissons bien, qui mettent en garde ou interdisent. Et Jean-Claude Pirotte les a laissé agir en lui.  Danger, hazard area ////// Danger, keep away !!!!!Des points d’exclamation, des flèches en éclair… Un bonhomme réduit à une forme noire, un corps universel… 

Des formules lapidaires et leur contexte qui ont fait naître de petits textes de prose poétique sur les périls de la vie humaine, un abrégé redoutable…

Zone hasardeuse, restez à distance… 

La poésie tranchante de Jean-Claude Pirotte, chanson triste mais douce… 

Sylvie Doizelet, Jean-Claude Pirotte, Les périls de Londres, Cognac, Le temps qu’il fait, 2010

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Zabou Breitman: « L’homme de sa vie »

4062010

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« Solitudes en sociétés », le thème des MaYaK 5/6 que nous préparons activement, écrivait plus bas Xavier Vanandruel… À ce propos, un hasard mayaque de plus : 

Il y a des films qui sont pour moi comme des points de repère pour penser une question. Je mets « penser » en italique parce que regarder un film n’est pas lire un livre et que la pensée qui découle ou coule d’un film a d’autres sources, un autre rythme, un autre déploiement que celle que charrie un livre (et je repense aux textes essentiels de DH Lawrence sur la formation des idées ou d’ idées provisoires, en phase comme on dirait en thermodynamique, à partir d’associations d’images, de tournoiements d’images rencontrées dans un film par exemple…). 

Je pourrais parler de Himmel über Berlin, de Zelig, du Miroir ou de Charles mort ou vif…* Mais c’est un film de Zabou Breitman intitulé L’homme de sa vie (2006) qui m’a abasourdi l’autre jour et m’a fait dire (et peu bêtement ; je fais ce que je peux) : un film, un vrai !… 

Imaginez un décor : large vallée de la Drôme, grande maison ancienne et branlante, un bois où l’on court, un village, une rivière, une piscine, l’intérieur dépouillé d’une maison de graphiste philosophe de la vie, une grande boite de nuit tonitruante traversée de battements de lumière, un hôpital où un père continue malgré tout à respirer. 

Dans la maison, des familles d’âges différents en vacance, des adultes, des enfants, une grand-mère. Un nouveau voisin – graphiste homosexuel qui intrigue – invité à un barbecue, un soir. Restent à discuter bien tard les deux personnages principaux du film : ce nouveau voisin et l’hôte, un ingénieur chimiste, la quarantaine. Ils parlent à l’aube. Thèmes de l’échange de paroles (un exercice de la parole) : vivre seul ou vivre en couple ?  L’insécurité foncière de la vie, l’assurance (illusoire ?) du couple, la famille, la sexualité, la mort… 

Une longue conversation aurorale, dense, spirituelle et amicale, que la réalisatrice découpe en courtes séquences lumineuses qui rythment le film. Entre ces séquences (trame du film) qui reviennent en creusant le sujet, des séquences de jogging dans les bois (les deux hommes travaillent leur souffle), de rencontres au village (notamment à un bal), des scènes près de la rivière, près de la piscine, etc. 

Des motifs et des lieux qui reviennent. Un de ces motifs : un enfant a apporté un microscope et observe des insectes ; la réalisatrice joue alors de zooms optiques ; un fil continu qui traverse le film : le regard sur le monde, les perspectives qu’on jette sur lui depuis l’enfant qui n’en a pas encore de fixe, jusqu’à l’adulte pris dans ses habitudes (et, cela se traduit au cinéma en  plongées et contre-plongées qui bousculent le spectateur, en scènes filmées et montrées dans des angles de vue différents, en plans fixes de détails qui sont réintégrés plus tard dans des travellings plus larges (détails du bois ou du village)). 

Des moments de fééries : une fête de mariage au village où l’on danse le tango ; la scène se fige et on se retrouve comme dans une chambre noire où les deux personnages principaux examinent, comme au microscope, le couple de jeunes mariés : sentiment illusoire ou non ? Un débat qui tend tout le film et dont les réponses se distillent lentement. 

Une jouissance manifeste à filmer la nature de la Drôme (dont l’eau qui coule), la beauté de la vieille bâtisse (dont les lumières et un curieux vent qui l’anime…) ; en contraste brusque, de gros plans sur le cadran d’un gsm qui reçoit un sms… Le calme de l’aube où une conversation se construit ; la lumière en éclair et le bruit de la boite où le voisin se rend pour rencontrer des amis éphémères. Car, au centre du film, la sexualité. Homo ou hétéro. Des séquences où la complicité érotique tendre et joyeuse (bien que problématique) d’un couple est montrée de façon très… belle… 

Une tonalité qui accorde tout le film : une espérance dans la recherche sincère d’une relation à autrui et à la vie plus juste et authentique. 

Et surtout, une grande fête du cinéma, du montage, de l’association d’images et de rythmes d’images, avec parfois une fantaisie d’enchaînement qui permet au spectateur de se libérer un instant de la profondeur du scénario, pour accueillir ensuite une nouvelle phase de pensée imageante-émouvante… 

Donc, à voir ! 

Hugues Robaye 

*Wenders, Allen, Tarkovski, Tanner (vous avez gagné !) 

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Habiter en poète

2062010

Hölderlin

« Territoires et décroissance »: c’était donc là le thème de la journée d’études, autour de la revue Entropia et de ses collaborateurs, à laquelle j’assistai voici quinze jours. Le matin, avant de prendre le train à la gare de Boitsfort, j’entendais à la radio le président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, déclarer que la crise financière actuelle était la plus grave depuis la fin de la première guerre mondiale. Cette annonce semblait éclipser toutes les autres  préoccupations pour l’avenir. Pour les sympathisants de la décroissance, dont je suis, cet accent exclusif  sur les difficultés de la finance mondiale  est dérisoire, car l’épuisement de la terre est une crise autrement plus grave. Comment se fait-il, alors, qu’on n’en prenne pas la mesure? Je crois que c’est le géophysicien américain Marion King Hubbert, spécialiste de la fin des ressources pétrolières*, qui a donné la meilleure réponse: « Notre ignorance n’est pas aussi vaste que notre incapacité à prendre en compte ce que nous savons ». Ou encore, peut-être se souvient-on de la déclaration de Jacques Chirac, alors président français, au sommet de la terre de Johannesburg: « Notre  maison brûle et l’on regarde ailleurs » (mais que s’en est-il suivi?). 

A quoi bon répéter encore dans une journée d’étude les données factuelles sur l’épuisement de la terre, si les participants les connaissent, mais qu’ailleurs on ne veut pas les prendre au sérieux?  Des deux axes de la réflexion sur l’après de notre civilisation industrielle, celui de la nécessité et celui du souhaitable, il n’est pas étonnant alors que ce soit ce dernier qui ait ce jour-là suscité le plus d’intérêt, parfois l’enthousiasme. A propos de la manière d’habiter un territoire, furent  évoquées notamment des expériences scandinaves d’habitats groupés. Au fil des interventions se précisait la recherche d’un équilibre entre le besoin de liberté individuelle et le besoin  d’insertion dans une communauté. Thème déjà traité dans Entropia par le philosophe et anthropologue californien  Marcel Henaff, autour de Jean-Jacques Rousseau, dont il montre qu’un souci majeur était la juste distance entre soi et autrui ( à ce propos, c’est précisément le thème de solitude et société qui guidera la matière des deux  prochains numéros de MaYaK). Le rédacteur en chef d’Entropia, Jean-Claude Besson-Girard, évoquait, quant à lui, le poète allemand Hölderlin, pour inviter à habiter en poète sur cette  terre, ou René Char, le grand poète français de la Résistance. Car ce n’est pas de l’enflure que considérer qu’aujourd’hui l’horizon, pas si lointain, est aussi sombre qu’il avait pu l’être alors.

La poésie est l’affirmation de l’illimitation de la réalité en « temps de détresse »…Si elle est d’abord mode de vie non mutilée, il s’agit de retrouver le chemin d’une pulsion plus forte que celle de la mort. C’est recouvrer une capacité de résistance et  de création propre à notre espèce. Cette potentialité est la dimension poétique de l’habiter de l’être humain sur la terre…

Jean-Claude Besson-Girard

Xavier Vanandruel

* c’est lui qui a donné son nom au pic de Hubbert







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