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Internationale des Nègres blancs

29102011

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Thoreau avait pourtant écrit au sujet de la presse : « Quand on connaît les causes, inutile de multiplier les exemples. » Inutile de lire les journaux… De regarder la télé, les infos : toujours la même chose. Concentrons-nous sur notre présent proche, sensible, beau et si fin…  D’accord, mais parfois… Et puis, c’est trop, maintenant. Il y a dix jours, (c’est loin pour l’info… dépassé), mon ami Laurent m’annonce la mort de Kadhafi. Et me montre sur le net, sur les sites de journaux réputés « sérieux », l’image d’un corps à moitié dénudé, couvert de sang, au visage figé dans une mort violente, avec des  légendes autorisées… Je regarde. Et me souviens des images de ce « tyran » qui, hier, narguait l’Occident, fardé, qui soignait très (trop) fort son image. Un homme. Et je vois cette image, avec date et heure, mauvaise image vidéo, estampillée : la bête est crevée. « We got him » comme a dit – a-t-on dit – le président des US. Je vois cela sur l’écran d’ordi.  Et la honte. 

Je vois cela et je me souviens des déclarations de Monsieur L (ministre de Belgique) : ceux qui ont consenti les premiers aux « efforts de guerre », seront les premiers servis pour la reconstruction de l’Irak, euh, pardon (c’est moi qui me trompe), de la Libye. » C’est quoi pour vous, la Libye, Monsieur L ? Un bazar abstrait à reconstruire ? Génial : détruire pour reconstruire pour combler des déficits pour que l’économie mourante… (et les entreprises, etc.). Etc. J’ai honte de voir cela, d’entendre cela. 

Cette indignité. 

Occidental, je participe de cela…  La honte. 

Au soir, Nafissatou, femme-comptable intègre du Burkina Faso, m’envoie un sms depuis Ouagadougou : « Je suis triste, le colonel est mort. » Le message d’une petite Africaine, bien intelligente et sensible. Je suis dans le métro bruxellois. Sous terre. Je revois cette image du corps ensanglanté et je repense au commentaire autorisé d’un « docteur en sciences de l’information » (et oui, il faut de tout pour faire un (im)monde), sur le site de « Le Nouvel Observateur ». Le joli professeur chenu dissertait sur cette photo : allait-elle servir à la canonisation de Kadhafi, ou pas (plutôt pas selon Lui) ? Il y avait une petite photo du Monsieur pour le rendre plus proche des lecteurs. Allait-elle servir ses intérêts ? 

Je regarde les passagers souterrains. Nafissatou. Mon visage se contracte un peu ; l’Occident de (grande) surface, j’en gerbe douloureusement… Une nouvelle image : la petite fille de Michel Simon dans le film d’Alain Tanner, Charles, mort ou vif ; elle s’indigne pour sa ville, Genève, colonisée par les publicités (-aires), par les marchandises, par le commerce, par… 

Je me sens un Nègre blanc. 

Hugues Robaye




Terre cuite à Tournai chez Faezeh Afchary

16102011

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« Tu vois, Hugues, ce qui est bien, c’est que les gens se réunissent là le soir, à l’Académie, autour de cette activité qui les passionne. Ils viennent de partout (ou presque !). Pas de différences de classes ou de nationalité ; on se retrouve à travailler la terre. On discute de notre travail. Chacun est inspiré différemment, poursuit son chemin, se concentre, travaille, se trouve…»

C’est mon amie  Faezeh Afchary, l’architecte céramiste d’origine iranienne (qui a collaboré au MaYaK4) qui m’expliquait cela l’autre soir au vernissage de l’exposition qu’elle accueillait dans sa galerie/atelier « Autour du feu », rue Morel, 17, à Tournai (Hainaut belge). Une belle galerie lumineuse pour montrer les travaux du collectif « Interrelude » (voyez « terre » au milieu du mot valise et le « jeu partagé », aux extrémités…), artistes/artisans discrets qui sont pour la plupart des (ou d’anciens) élèves d’Émile Desmedt

Fazy réunit chaque année les travaux de ce groupe. En 2011 (cette année), un autre ami, l’éditeur Pierre Dailly, a eu l’idée d’interroger les artistes sur le pourquoi de leur travail, sur leur démarche. Cela a donné une vidéo, projetée en boucle à deux pas du four de cuisson. Enfin, Marie-Clotilde Roose, philosophe et poète, exercera son art (ses arts) sur chacune de ces œuvres céramiques, ce vendredi 21 octobre à 19h. Venez donc !  Assembler ces créations, les scénographier dans ce bel espace accueillant ; interroger les céramistes sur leur démarche, trouver des paroles pour en parler, un processus complet…  Hugues Robaye 

PS : Fazy est la meilleure représentante mayaque de Tournai (si tu me permets, Fazy !) et projette une expo sur les jeunes graphistes iraniens, assorties de work shops… MaYaK s’y associe…

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Rimbaud au pays du porphyre, Éric Durnez

16102011

ricdurnezetatelierfazyoctobre2011001reclr.jpg il nous arrive d’être sérieux au siège mayaque de la potterée: à gauche, chef mayaque, à droite Éric Durnez

Il nous faudrait plus de poètes mercenaires pour donner sens à nos vies. 

Ce vendredi 14 octobre, nous assistions Sylvie Cuvelier et moi à la lecture par Éric Durnez d’une version encore inachevée de sa pièce sur le monde des carriers de Lessines. On fête l’année prochaine les 150 des carrières de porphyre et de leur exploitation par les « cayoteux ». Le Centre culturel René Magritte (avec qui, en la personne de Myriam Mariaulle qui nous invitait ce vendredi, nous avons collaboré l’année passée dans le cadre du salon des livres de Tournai) a organisé dans ce cadre là une résidence d’auteur. Ainsi, armé de son porte-plume effilé (il s’agit de cet objet qui sert à écrire à la main et que l’on remplit d’encre), Éric Durnez est remonté à trois reprises de son Gers d’adoption pour travailler à ce projet. 

Se balader, prendre l’atmosphère des lieux, évaluer la demande des commanditaires, rencontrer les acteurs réels, les carriers, s’imprégner, lire ; laisser les images, les mots, les situations faire leur chemin… Le poète synthétise un monde. Poète ? Celui qui révèle des formes de vérité par la langue, par les mots qui lui viennent et qu’il ordonne un peu et rigoureusement ? 

De la poésie appliquée. Au monde de la carrière, de la pierre, du travail pénible mais aimé… Alors, si ça marche, les carriers comprennent mieux leur amour ! Je pensais à cela quand nous sommes arrivés avec Sylvie à la caserne des pompiers de Lessines où nous allions écouter Éric lire cette version en chantier. Je me demandais, comment il avait travaillé. Cela m’intéressait beaucoup de suivre et de comprendre son cheminement. Et ce qui en avait résulté. 

Nous avons donc d’abord entendu le résultat. Et je dois dire qu’il m’a assez soufflé. (Éric Durnez avait (notamment) lu le Louis Scutenaire (surréaliste belge) de Raoul Vaneigem (chez Seghers) et retenu le nom de Rimbaud que « le Scut » aimait tant. Rimbaud était passé par Bruxelles et Charleroi. Pourquoi pas par Lessines ? En creusant ce filon, le Gersois d’adoption découvrait que plus tard Rimbaud allait gérer une carrière à Chypre…). 

La pièce que nous écoutions mettait en scène un jeune poète de 17 ans et de passage(s), voulant assister à une explosion de porphyre (de celles qui inspireront plus tard Magritte pour ses rochers suspendus dans les airs et qui pouvaient symboliser aux yeux du poète de 17 ans (revisité par Durnez), et à ses sens de jeune anarchiste, la destruction pour mieux reconstruire). La pièce avait aussi pour personnages sa logeuse, une jeune paysanne herboriste (le pays des collines, c’est en effet le pays des herbes sauvages magiques), veuve prématurée d’un paysan devenu carrier, et l’ « Ancien », le carrier qui a pénétré les mystères de la pierre, du sous-sol, approché celui du chaos des origines… Oulala, mon dieu (MaYaK tout-puissant), cela aurait pu être bien lourd… Mais en fait ce n’est que ma présentation, mal équarrie (tel un éclat de porphyre négligé), qui l’est… 

Car en fait, à l’audition, je constatais que toute cette matière éclairante, tactile, symbolique, mythique se distillait subtilement en courtes saynètes de dialogues entre le jeune homme fragile et exalté et la jeune fille qui se méfiait de ce « poète » et entre l’idéaliste révolutionnaire (ce même Rimbaud) et l’Ancien qui exprimait la noblesse mystérieuse et concrète de son travail… Alternance de point de vue sur les carrières et le travail des carriers. Échanges entre les personnages, qui s’approfondissaient de saynète en saynète. Des personnages qui se transformaient mutuellement par petits apports (langagiers). Méfiances par rapport à la langue du poète de qui la jeune fille et l’Ancien reconnaissaient pourtant la sensibilité à ce milieu qu’il cherchait à connaître. 

C’est évidemment jubilatoire (et périlleux) pour un écrivain de se mettre à la place de Rimbaud. Éric Durnez a procédé à de discrets collages d’expressions rimbaldiennes glanées notamment dans la correspondance du poète voyant. Correspondance, parlons-en : dans cette version de la pièce, les courtes saynètes de dialogue sont ponctuées de lettres où Rimbaud se lâche – nouvelle perspective, ou forme de langue, sur les carrières – et qu’il envoie à Bruxelles à un certain Verlaine (un poète, semble-t-il). 

Éric Durnez incarne donc Rimbaud avec une sobriété profonde mais aussi avec un humour discret (vous entendrez et verrez). En définitive, je trouvais très émouvante la manière dont il est parvenu à exprimer la fragilité de ce génial hypersensible face à une femme de
la Nature ( !), qui bien sûr le séduit, et à un homme d’expérience (qui, de plus en plus confiant, se livre progressivement à lui)… 

Tout ce travail de mise en forme au service d’une activité industrielle qui marque encore le Lessines d’aujourd’hui. 

Oui, engageons encore des poètes et qu’ils nous montrent mieux le monde dans lequel nous essayons de vivre ! 

Éric Durnez est venu hier à la potterée, siège mayaque. Je l’ai interrogé sur sa démarche et vous entendrez bientôt des extraits de cette conversation. La pièce sera créée à Lessines en juin prochain (Jean-Claude Drouot incarnera l’Ancien). Nous ne manquerons pas de vous avertir ! 

Hugues

 

 ricdurnezetatelierfazyoctobre2011004lr.jpg La pièce se termine bien







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