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Au Burkina (3)

8022012

Au Burkina (3) Num%C3%A9riser0002-150x90  Hugues, Laetitia Klemtoré et Mady Sankara, par Yvo Moussa                                                                                                                                                                                                                                     

Un troisième billet de Hugues, reçu ce 7 février:

Bonjour!
De nouvelles rencontres enthousiasmantes ici au Burkina. 
Comme Sylvain Korogo qui se forme auprès de Pierre Rabhi dans les années 80, du temps du président Sankara et organise des formations en agroécologie dans le cadre de son association AVAPAS. Il nous rencontre paré de son superbe «sankara arrive», habit traditionnel que le président ci-haut avait demandé de porter à nouveau du temps de son mandat. Dans son habit noir et or, Korogo nous raconte ses souvenirs et nous parle de ses projets, comme celui de demander le déclassement de sa forêt natale afin d’y réimplanter beaucoup plus d’essences d’arbres désormais disparues. 
Dans l’Ouest, dans le Yatenga, nous visitons les installations des groupements Naam, initiés par Bernard Lédéa Ouédraogo dans les années 70. « BLO, presque un dieu au Yatenga », nous disait notre hôte à Ouaga; BLO qui réussit à écarter les famines en écoutant les paysans (formé en sociologie à Paris, il retourne dans son village pour étudier à fond les systèmes d’entraide paysanne des Mossi, les valoriser et les adapter au monde d’aujourd’hui). « Développer sans abîmer »: l’une de ses devises. Il met au point des techniques de séchage des légumes, ce qui permet de passer la saison sèche sans trop d’ambages. « Goûtez donc notre couscous de pomme de terre », nous conseille-t-il… « Une invention de nos groupements de femmes dont je vous invite à aller voir les réalisations diverses (notamment les savons) dans notre atelier », ajoute-t-il, lui qui a 82ans et sort d’une difficile convalescence… La veille nous étions sur les hauteurs de sa petite ville natale, Gourcy, et rencontrions les potières renommées, qui entreposent à ciel ouvert leur production toute utilitaire. Comme par exemple ces pondoirs pour poules arrondis comme des oeufs à venir ou ces « canaris » qui servent à conserver l’eau fraîche. Entrepôt à ciel ouvert car disent-elles, personne ici ne volerait un produit de la terre pas plus qu’on ne volerait ces briques de banco destinées à construire un muret entourant la cour (par contre on volera un seau en plastique servant de valeureuse poubelle, dans un pays où chacun jette ses déchets à terre…). Dans la lumière du crépuscule, les femmes préparaient un bûcher: bouses de vaches puis bois de section de plus en plus grosse et disposaient entre ces combustibles des formes rondes à biscuit, en terre à cuire… Nous passions à côté d’une cour avec son grenier à mil arrondi, couvert d’un chapeau de paille pointu que l’on écarte délicatement pour qu’un enfant s’y glisse et ramène un peu de mil… Nous arrivions alors chez leurs maris, les forgerons de Gourcy et sous leur auvents couverts de paille nous suivions toute la chaîne de production de ces petits bracelets de cuivre que pour l’heure ils fabriquaient. Le chef me montrait une charrue qu’ils venaient de monter et des machines en tôle servant à éplucher les légumes, comme le maïs.
Une semaine avant, nous avions rencontré dans son musée de Manéga, dédié à la vie traditionnelle des ethnies du Burkina, Maître Titinga Pacere, le premier avocat du Burkina et aussi Ministre des Coutumes de ce village dont il écrivait jadis l’histoire. Il nous parlait de la bendrologie, cette science des tambours, et du langage des masques, tout en évoquant les différences entre les droits coutumiers et le droit moderne qu’il avait appris à Rennes…
Il faudrait bien sûr parler de la Brakina (la pils locale) et du dolo, cette boisson artisanale fermentée que l’on boit parcimonieusement dans une calebasse, sur la place du village, ou dans les rues de Dédougou tout en suivant des yeux les hommes masqués et armés qui rançonnent les passants et entrent dans les cours des familles (c’est l’époque des masques dans cette petite ville que nous venons de visiter et où un soir, sur la place du village devant une grande assistance,  j’ai pu entendre ravi, des chants musulmans répétitifs en dioula).
Demain, nous partons pour le Sud et les réserves, aussi pour visiter quelques villages gourounsi aux architectures si étonnantes.
Mais le 13 février se rapproche, jour de mon retour en Belgique…
Avec toutes mes salutations amicales,
Monsieur Hugues






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