Enfances de l’art ; à propos de HERVÉ YAMGUEN et d’autres :-)

21072019

ea1 ea3 ea8 peintures murales de Hervé Yamguen ; atelier de Seydou Sanou au Conservatoire de BXL

Hervé Yamguen, dans une grande ville africaine, Douala au Cameroun : quelle est la place d’un artiste dans la ville, dans la société ; comment intervenir ? Comment engager ses forces, sa « nécessité intérieure » d’artiste dans une vision du monde, a « complex vision », as said the great JOHN COWPER POWYS, ce mage celte hallucinant…

Comment toucher les gens, comment les faire réfléchir à un avenir ? Comment s’engager sans trahir sa nécessité intérieure (Kandinsky) ?

« Mécontentement joyeux » ! Être toujours comme un enfant adolescent, un soleil qui se lève nouveau chaque jour… Ne jamais accepter l’état de fait, le matter of fact

Susciter, proposer à la vue, aux sens, à l’intelligence : une certaine vision du rôle de l’artiste.

Et tenir bon aussi car c’est pas facile de « gagner sa vie » que pourtant une Mère nous a donnée…

Hervé Yamguen, animant un quartier d’une grande ville africaine, est aussi notable dans son village natal, réfléchissant et partageant sa réflexion au sujet de cette dynamique entre traditions et présents multiples, entre Cameroun, Afrique et monde…

Tout cela est, oui, politique, au sens le plus signifiant du mot.

Et je suis donc ravi de poursuivre avec Hervé Yamguen et le poète Kouam Tawa un échange de visions qui se déposera dans un livre à venir chez Phare Papier (Flobecq) !

Projets passionnants, « merveilleux » (toujours selon ce principe de DH LAWRENCE : être habité de projets qui dépassent notre petit moi :-) ), vitaux, simples et justes…

À Lessines, le 3 août 2019, en compagnie de SEYDOU SANOU (BF), n’goni & balafon et FRÉDÉRIC WILLIAUME (B), sax…

HR

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Que fais-tu au juste au Burkina ? (2)

8042015

boubacar blog2 Dori, 17 février 2015, propos de Boubacar LY.

Suite : Venons-en à longer l’abîme (tout relatif !).

« Que fais-je au juste au Burkina ? »

D’abord, sais-je « au juste » ce que je fais ? Tout au plus, des réponses en rhizomes s’élaborent en moi. Par ailleurs, je ne sens pas vraiment que le « je » « fait » quelque chose dans ces histoires expansives, ondulatoires d’amitiés, de réseaux. Les termes de la question de départ se dissolvent, même ce nom de pays est pulvérisé par les 65 ethnies sans frontières du « Burkina », par tous les petits villages, microcosmes de brousse.

« Je » ? Le corps sensible, animé, qui existe est touché par des expériences vitales, ça c’est indéniable.

Certes, je réfléchis à des projets… Mais. « Je » reste dans l’inconnu (à la rigueur). La rigueur frontale et englobante de l’inconnu… J’ai pris l’habitude de commencer par dire à mon interlocuteur africain : « Je ne comprends rien ici, mais des lumières apparaissent, des éclats que j’essaie d’assembler, d’assimiler (dans le sens alimentaire, où des nutriments s’intègrent au corps percevant)… Il y a de tels fossés de cultures, entre Blancs et Noirs, entre villageois et gens des villes, celles du nord comme celles du sud, tant de projections de part et d’autres, comment savoir ce que ressent ou pense l’autre ? Et en particulier quand nous allons au village. Il faudrait rester longtemps en brousse, y habiter, apprendre la langue, vivre simplement, se laisser apprivoiser, que l’étrangeté du blanc se fonde un peu dans le paysage.

« Faire au juste » ? Résonne en moi le proverbe peul que cite Amadou Hampaté Bâ : « Quand une chèvre est présente, il ne faut pas bêler à sa place. » Nous voilà avertis. Traduisons : le rôle de Burkimayak serait de déplacer des chèvres ! De les faire bêler ensemble à un monde voulu meilleur… Et puis, des chèvres de races différentes ont le droit de se croiser sur le chemin, de se côtoyer, non ? Les chèvres se rencontrent-elles facilement sur les terres non-clôturées du Burkina, où elles vaguent en liberté ? Rassembler des chèvres, voilà une tâche utile, peut-être, d’autant que les loups (chinois ou occidentaux) rôdent. 

Du fond de l’abyme, cet écho : la réponse tranchante de René Dumont à une question qu’on lui posait souvent : « Que peut-on faire pour eux [les Africains] ? Leur fiche la paix. » Le mot « faire », à nouveau. La réponse de l’agronome vise-t-elle les  intentions charitables sous-jacentes à cette question (que peut-on faire pour ces pauvres gens?) ? Ou plus largement, la question de l’intervention du Blanc en Afrique, car lui, après tout, intervenait, menait des projets…

Faire, avoir des projets… Nouvel écho insistant, le dialogue constituant que mène en moi depuis plus de six mois Jiddu Krishnamurti – ce penseur radical qui refuse toute autorité. Jiddu me rappelle constamment la place secondaire des projets à court ou long terme et ramène mon corps percevant au présent intégral. Être dans la société (où s’élaborent les projets) mais surtout en dehors. Mais cet écart, ce recul, font advenir d’autres relations au monde, aux vivants, sans promotion du moi, sans violence : que cette priorité du présent dense, fort, infini guide notre attitude au sein des projets auxquels nous participons. Faire : comme les ondes du caillou dans l’eau. Des projets souples, dynamiques, changeants…

Autre étrangeté : au fond, je ne reviens jamais vraiment du Burkina. Quand je rentre en Belgique, le contraste me rend de plus en plus sensible l’effroyable de la « société capitaliste de pointe » consumériste-productiviste, arrogante et violente, sur fond d’acquis (bien sûr menacés) sociaux extraordinaires (qui résultent de façon ambiguë de l’industrialisation brutale qui sous-tend ce consumérisme productiviste)… Les « horreurs économiques » : jeunes et moins jeunes « sur le marché de l’emploi », dépressionnaires à la chaîne : 20 lettres de demande de « job » (un terme volontiers employé par les hommes politiques flamands) ; une réponse, négative… Les battants et les abattus. Le marché abattoir de l’ « emploi » (être employé, utilisé, aliéné). « Créer de l’emploi », préoccupation dite majeure, alors que depuis 50 ans, des chercheurs appellent à une réflexion sur le sens du travail, puisque la technologie et les machines automatisées diminuent inéluctablement les besoins en « main d’œuvre ». Or les gens de pouvoir en sont à culpabiliser les citoyens… parce qu’ils n’ont pas de travail à leur donner… (et qu’ils ne sentent même pas qu’ils doivent encourager celui qu’ils veulent donner, celui qu’ils ressentent en eux comme nécessaire à la société dans laquelle ils vivent)… DH Lawrence fait cette différence entre le « labour » et le « work », travail qui se développe nécessairement et spontanément à partir de la force spécifique que chacun a en lui et qu’il se doit de donner au monde.

Je reviens donc de ce lointain, du Burkina avec des énergies choisies – distinguée par mon regard neuf d’étranger – qui circulent en moi. Un pays africain à l’organisation encore informelle, peu réglementée, la débrouille généralisée, les microéconomies de village à l’autosuffisance fragile ; la chaleur, le soleil, l’Harmattan ; les terroirs que les villageois connaissent encore bien, les « chemins rouges » (pistes en terre), la brousse qui enserre et fait vite oublier les villes qui ne sont qu’agglomérats fantaisistes ; l’indolence ; les hangars où l’on palabre ; l’artisanat généralisé, les savoir-faire et vivre émanant de traditions ; les corps sans graisse, droits, sains, souriants ; des recherches-actions audacieuses, des pensées pragmatiques et programmatiques inventives (comme celle de Boubacar Ly) qui se greffent sur ce substrat : des expériences qui m’incitent à approfondir ces échanges entre chèvres de races différentes…

Je reviens du Burkina et un patron des chemins de fer belge qui coûte cher déclare dans un entretien que l’usager des trains (celui qui l’honore en faisant appel aux services des employés qu’il « gère ») coûte 6900 euros par an et rapporte 3000 euros ; un premier ministre fédéral demande à des prépensionnés (qui ont donc choisi de ne plus travailler pour se reposer légitimement et aussi pour céder « la place » à des plus jeunes moins coûteux, comme on leur suggérait avant) de s’offrir à nouveau sur le marché de l’emploi et de ne pas quitter le territoire au cas où ils seraient appelés au front du travail ; cela pour soulager l’office des pensions. « Pensée », logique effroyables.

Je reviens cette année avec quelques œuvres inédites d’un sage burkinabè – Boubacar Ly. L’une d’elles : De la politique : l’homme politique : un « prestataire de service » (expression reprise avec facétie) qui doit sentir le « rêve » d’une communauté, aider cette communauté à exprimer son aspiration profonde et à la situer dans un ensemble. Doit lui montrer des voies de réalisation possibles pour ce rêve collectif… Le politique doit être sage, avoir de la hauteur, ne pas exercer de pouvoir, ne pas s’enrichir, ne pas avoir de programme mais appuyer les volontés profondes d’un groupe et celles de ses membres, car chacun a un rôle à jouer dans l’ordre cosmique qui oriente la politique humaine, lui donne sens et horizon. Boubacar Ly est une personnalité respectée, souvent interrogée par les médias burkinabè pour ses vues au-dessus de la mêlée. Nous l’avons rencontré longuement aux portes du Sahel, à Dori, dans son « école de la sagesse sur dune, entrée espérée »… La question était donc : « Que peut-on faire pour les aider ? » ?

Au Burkina, je rencontre des personnes qui vivent, travaillent, aiment, ont des enfants, des Vieux, sont dans la Nature, le temps, la mort, entre peines et joies… Des humains (comme nous). Que peut-on faire pour s’aider ? Échanger nos solutions respectives, nos inquiétudes, nos mécontentements par rapport à certaines logiques contemporaines. Rester « dans l’interrogation et le doute, dans une ardente investigation » (des termes de Jiddu Krishnamurti)…

Dans ce classique des années septante – « La pauvreté, richesse des nations » –, le Béninois Albert Tévoédjré montre que les traditions africaines ont un autre rapport au monde matériel, à la propriété et à l’opulence. Cette pauvreté, richesse des nations, elle est à rapprocher de la « sobriété heureuse » préconisée par Pierre Rabhi… Nous cherchons d’autres façons de vivre. Comment simplifier cette complication infinie de la société productiviste et consumériste ? Nous dépendons  tous d’une chaîne de production et de distribution d’une complexité inimaginable, sur laquelle repose une conception du travail infiniment fragmenté. Et cette technologie fascinante qui nous emprisonne ? Et chacun a peur de perdre sa minuscule parcelle de sécurité et de « pouvoir d’achat »… Et puis, il y a les crédits qui nous enchaînent. La Nature se meurt… Comment sortir de cela ? Ou être dedans par nécessité et défaut, tout en étant au dehors… Les sociétés africaines offrent leurs réponses à cette recherche.

Je vais là-bas à la rencontre d’Habitants Chercheurs, de Porteurs d’Espoir, d’Africains qui pensent l’essence de leur société et aimerait la développer sur cette base, conscient que cela peut constituer un modèle alternatif de développement chez eux et chez nous, « intégré » (selon une notion de Jiddu), cosmique, respectueux de la Nature et des autres.

« Porteurs d’espoir » : quand je reviens du Burkina, je me demande quel avenir se profile pour ceux qui commence à travailler, quelle perspective, quel rêve de société comme dirait Boubacar Ly ; je repense au grand économiste de terrain, EF Schumacher qui déplorait que la rentabilité s’imposât comme seul critère de départ des activités dans la société d’aujourd’hui. Quand je rentre, j’ai l’impression qu’on me recrute de force dans un mauvais, mensonger et angoissant psychodrame de crise et de croissance économique. Mais j’ai déjà 28 ans de « carrière » derrière moi et ce bonheur intuitif et sûr d’avoir un travail à faire, qui s’impose en moi, quelles que soient les conditions sociopolitiques : mes prérogatives de chef mayaque insaisissable (où sont les smileys…) ; j’ai beaucoup de chance, donc, et je me sens profondément triste et en révolte devant tous ces mensonges qui polluent les jeunes, et qui sont encouragés par des individus censés nous représenter. Dès lors, ne faut-il pas chercher et répertorier de façon systématique des voies d’ouverture, de nouvelles respirations, de meilleurs exemples, des Porteurs d’Espoir, ici et ailleurs, et confronter nos inquiétudes inventives et créatrices, nos beaux bêlements ?

Hugues Robaye




Affectivité mayaque

19042014

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Il y a une affectivité mayaque. Une manière de se laisser toucher, émouvoir par l’autre, par tout ce qui n’est pas notre corps dans ses limites floues et ses extensions infinies. L’affect, comme l’action des lumières qui touchent les papiers photographiques et l’âme du maître photographe qui intervient… Dans la démarche mayaque, dans l’enquête mayaque, dans l’organisation mayaque, cette affectivité est au cœur ; il s’agit d’une certaine relation au « savoir », prudente (dans le sens aristotélicien de la prudence qui fait que la personne est attentive aux différences et se conforme à elles pour approcher avec délicatesse l’autre) ; comment en effet approcher l’autre pour le sentir, le percevoir, effleurer ses silhouettes, fixer un moment – illusoirement – ce qu’on a perçu de lui, en une expression artistique, un texte, une image, etc. ? Une affectivité mayaque, une sensibilité à la fragilité des phénomènes, une bienveillance eu égard à cette mortalité que porte chaque chose en elle. Je reste imprégné par la manière dont les Grecs appelaient les hommes « des mortels » tout comme par cette prise en considération fondamentale par le philosophe Heidegger de l’être à la mort…  Phénomène : cet autre qui apparaît, que nous ne connaîtrons jamais mais en compagnie duquel nous aménageons une rencontre, un croisement éphémère. Toujours dans un hors-cadre. Sans formalisme, en essayant d’écarter les formalismes. Toujours nus. Toujours dans la vie, un savoir vital, généreux, gratuit, dans l’humour et l’amour. Écarter la peur (méditation tantrique continue, imperceptible), faire en sorte que la peur n’apparaisse même pas ; être rayonnant, être « aristocrate du soleil » (DH Lawrence) car la rencontre de l’autre devrait y porter. Être accueillant, hospitalier, amical. Dans un échange naturel d’énergies qui se partagent (taoïsme).

Sans doute les circonstances me font penser à cela : la semaine prochaine, arrive en Belgique celui qui m’a confié les archives de sa mère spirituelle, Annie Van de Wiele. Je me souviens de ce voyage à Miradoux, dans le Gers, cette « Toscane française » où s’intégraient mes pensées du moment. De Charles Oliver Cooper qui me détaillait précisément le contenu de ces caisses d’archives qu’il m’avait préparées avec soin. Archive est un mot poussiéreux qui pourtant contient tout une vie intime accessible à peu. Je remontais en Belgique et j’explorais ces documents d’où émanait une vie audacieuse qui se formaient, en ce temps d’études, devant mes yeux, la vie de la première femme à avoir fait le tour du monde en bateau, puis à avoir réalisé – avec « son capitaine » – des rêves (hors cadre) ; cette vie, une sorte de modèle, dans le sens où elle questionnait et questionne(ra) les nôtres ; un point de repère suggestif. Là, c’était dans le cadre de mon travail rémunéré que cette affectivité mayaque se faisait sentir, débordant ce cadre. Il s’agissait pour moi de recomposer la vie d’une femme que je n’avais pas connue et qui devenait une amie posthume. Je devenais un gardien de sa vitalité qui survivait à la mort, me nourrissant de ce qu’Annie avait laissé, exprimé de sa vie…  

Autre circonstance englobante, le vernissage du « Lointain de Près : un Iran de jeunes graphismes » au terme de ces semaines de recherches sur les cultures perso-iraniennes, en dialogue avec Faezeh Afchary-Kord et un réseau de liens qui s’est amplifié jour après jour. Ces jours en pleine affectivité/sensibilité mayaques, où je mettais en page un catalogue livre qui jour après jour enregistrait des trouvailles visant à faire sentir ce lointain : la société civile iranienne. Le grand mage John Cowper Powys, conférencier survolté, se disait un « charlatan de la culture », de ces hommes qui vantent avec un enthousiasme communicatif des potions qui font mieux vivre, et lui, ses potions, c’était Homère, Héraclite, Thomas Hardy… qu’il incarnait dans sa parole et son corps animé, gesticulant, possédé, hors cadre académique… Je garde ce modèle précieusement. Au fond, ce travail dans la gratuité et l’amitié conjuguées est sans doute le plus important. Des soutiens, des sympathies viennent d’un peu partout et c’est comme si on inventait en contact avec toutes ces matières – que ce soit les récits de vie d’Annie ou cette récolte et composition de détails vivants qui forment au bout du livre un Iran –, c’est comme si on avait la puissance (DH Lawrence) d’inventer un monde où l’échange avec l’autre se fasse dans la tranquillité, la bienveillance, la lenteur, la surprise, l’étonnement, l’amitié, la pensée des différences et des complémentarités, dans un jardin éternel.

Hugues Robaye




En hommage à David Herbert Lawrence, Librairie Quartiers Latins, le samedi 23 mars, à 15h

16032013

En hommage à David Herbert Lawrence, Librairie Quartiers Latins, le samedi 23 mars, à 15h dans David Herbert Lawrence lawrence-1-72-blog-264x300 David Herbert Lawrence, 2 oeuvres techniques mixtes par Nathalie de Vooght

Je participerai samedi prochain à une table-ronde à la Librairie Quartiers Latins, place des Martyrs, à 1000 Bruxelles. Autour de l’œuvre-vie de DH Lawrence.

C’est pour moi comme une nécessité intérieure de témoigner au sujet de mon Grand Frère, de mon Ami Intime… Les mots de Lawrence continuent à circuler dans mon sang ! À me nourrir, à me donner de l’énergie. Ça marche, j’ai essayé…

Sa recherche inlassable d’une « aristocratie du soleil », d’un humain qui reconnaîtrait sa force spécifique et la ferait rayonner, sans jalousie, pour les autres et pour lui… Pour le monde, surtout. Infatigable voyageur, toujours sur le départ, constamment perméable au monde : Lawrence. Chercheur : poète, romancier, nouvelliste, essayiste, épistolier, chanteur, bâtisseur, ébéniste, botaniste, marcheur…

Merci David Herbert d’avoir survécu 45 ans, tuberculeux, dans un monde qui voulait par tous les moyens étouffer ton vitalisme…

Hugues Robaye

Pour tout renseignement : www.cfc-editions.be

lawrence-et-construction-72-300x217 dans Quartiers Latins




Soirée mayaque, 2, 100 Papiers

16122012

Soirée mayaque, 2, 100 Papiers dans Alice Bossut equilibriste-blog-300x200équilibristes et mondes, NATHALIE de VOOGHT, 2010.

Cela fait déjà un petit temps que je me dis que je dois écrire quelque chose à ce sujet. Mais cela ne sort pas vraiment… C’est au sujet de la présentation mayaque à 100 papiers, mais je crois que cela déborde bien de cela et touche à autre chose.

On m’avait plusieurs fois parlé de cette jeune librairie. Et j’ai téléphoné un après-midi pour proposer une rencontre mayaque. Un oui direct. Consultez le programme et vous pouvez prendre une date. Ce lieu est à vous, est-il écrit sur le site de la librairie… Il restait la date de la Saint-Nicolas, pas facile. Et puis à composer une soirée. Isaia Iannaccone, Sébastien Verleene, Maximilien Atangana ont répondu directement oui. Max pour une performance bénévole, « pour MaYaK ». J’invitais Madi Niekiema qui me proposait un peu plus tard de venir avec son n’goni (une sorte de luth de l’Afrique de l’Ouest)… J’invitais Jean-Pierre Dusoulier que j’avais failli rencontrer à l’époque du cabanon Paul André (toujours d’actualité), lui qui avait été un de ses grands amis. J’échangeais avec Jean-Pierre un peu accidentellement par les bonnes grâces de facebook et je me rendais compte que son engagement de toujours dans les campagnes et les villes en transition s’accordait à merveille avec le projet burkinabè de recherche-action autour de l’animation de villages et du développement endogène. Jean-Pierre allait venir et me proposait, lui qui est conteur et chanteur, d’apporter sa voix, sa contribution de lecteur à la soirée… Alors je commençais à imaginer une espèce de scénographie. Une suite de matières, des répons de musiciens et de lecteurs, placés parmi le public. Avec Xavier qui comme moi s’ennuie aux présentations littéraires, on se disait, il ne faut pas faire trop long, pas emmerder les gens… Les choses se mettaient spontanément en place, sans difficulté. La structure s’enrichissait de jour en jour, la structure dynamique de ce temps d’une soirée où un échange se ferait. Je pense toujours aux équilibristes que Nathalie de Vooght a dessinés il y a quelques temps pour MaYaK (toujours d’actualité). C’était une commande et Nathalie y avait répondu avec ce plaisir gratuit que les Mayaques partagent avec les enfants. Ces équilibres fragiles, ces projets de société où la générosité est au fondement.

Je repense à Madi Niekiema, le musicien qui veut d’abord développer une forme d’auto-suffisance un peu rémunératrice, chez lui au Burkina, pour jouir de son art de musicien sans dépendre de personne… On en parlait ce vendredi, avec le comédien danseur poète Maxime Guidot-Dejoux et lui. D’un jour à l’autre, des foyers d’énergie qui font croire à ces sociétés possibles ( ?) qui sont dans la devise de MaYaK. Ce texte est désordonné. Pas grave, ça arrive. Il essaie de faire sentir cette « puissance », au sens lawrencien du terme que j’ai ressentie chez ces personnes à la soirée et plus tard au gré des rencontres que notre initiative culturelle suscite. Puissance comme force intime juste qui émane du corps d’un homme quand il sent ce qu’il doit faire sur cette terre (c’est la conception de Lawrence)… Anouk Brouyère rencontrait Jean-Pierre Dusoulier à cette soirée, eux qui travaillent tous les deux au renouveau des campagnes… Laurence Warnier était là qui réagit si spontanément aux stimuli mayaques. Comme le compagnon des premiers temps, Jacques Faton… Et Alice Bossut qui la première me parla de cette librairie accueillante et courageuse et engagée… Qui diffusait MaYaK et qui dessine pour la revue-livre. Et le peintre écrivain Frédéric Dambreville qui est aussi lecteur de Lawrence et de Dhôtel, le philosophe des champignons indéterminables.

Oui bon, encore un texte triomphaliste. Non. La situation financière de l’assoc qui produit MaYaK est mauvaise mais le tissu est de plus en plus résistant, le réseau en rhizome comme le psalmodiait Maximilien, à cette soirée.

Eh bien, merci, merci, vraiment…

HR




David Herbert Lawrence

24072011

avrilmai2011cabanonpottere112lrblog.jpg Toute vaisselle est sensuelle

Très honoré David Herbert, 

Je me suis permis d’écrire un texte à votre sujet. Enfin « je », c’est un grand mot, tout petit… Quelque chose m’est venu en 2006 et je viens de remodeler cette matière. « Je » n’écris pas ; le corps retranscrit des faisceaux d’énergies qui s’y rencontrent, s’y jouent, s’y dansent ? 

Et puis, ce n’est pas « à votre sujet », c’est autre chose, qui, en fait, nous dépasse toujours, mais on s’y frotte… Toujours. 

Vous diriez presque ça, non ? 

En relisant ce texte, je me suis dit : « Allez, Hugues, ce n’est pas mal. Ce n’est pas définitif mais Lawrence sera content, je crois. » 

« J »’ai essayé de faire sentir le centre agissant de votre travail. 

« Je » vous devais cet hommage, à vous qui donnez tant. 

Avec tout le respect que « vous » sentez bien, « vous » dans les airs, dans la terre, dans les corps, tout comme « nous » d’ailleurs. 

Hugues

le pdf :  David Herbert Lawrence dans David Herbert Lawrence pdf lawrence.pdf 




« Etruscan places », David Herbert Lawrence, Le bruit du temps

29052010

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En 2009, c’était le premier volume des nouvelles complètes, dans une traduction de la dernière édition critique publiée à Cambridge. Cette année, « Le bruit du temps » publie l’un des plus beaux livres (à mon avis) de DH Lawrence, Etruscan places. Dans une nouvelle traduction de Jean-Baptiste de Seynes (Croquis étrusques), avec préface, appareil critique, appendices historiques, carte et 52 reproductions NB et couleurs.

Etruscan places, livre atypique : entre essai et récit de voyage, récit d’un cheminement dans le savoir, dans la compréhension sensible du mode d’être d’un peuple ancien… Lawrence parcourt la Maremme (Italie du nord, méditerranéenne), alors en plein travaux d’irrigation, et va de tombe étrusque en tombe étrusque confronter ce qu’il a lu et ne lui a pas plu, à l’expérience directe des fresques. Retrouver le mouvement vital des Étrusques. Retrouver ces corps dansants, cette sexualité gaie et franche, vitalisante ; une forme de vie débordante et joyeuse, pas loin d’une osmose avec les milieux naturels.

DHL était à la recherche de formes de vie humaines moins cérébrales, plus sensualistes, plus simples, plus proches de la Nature, mieux rythmées, moins cupides, spontanées, stimulées par les forces cosmiques…

Et dans Etruscan places, on voit un Lawrence perméable à toutes ses expériences, tant en présence des fresques, qu’à l’auberge où un berger faunesque, sorte de réincarnation de Pan entre et le fascine ; que sur les routes, dans les paysages, avec les fleurs… Toutes ces images senties tournoient et forment la compréhension éphémère et subtile qu’il nous donne à lire.

Bref, ce livre : un condensé de méthode Lawrence appliquée. La méthode Lawrence ? Être au monde, le comprendre de cette façon, décrite, par exemple, dans Apocalypse :

« L’homme pensait et pense encore en images.  Mais maintenant nos images n’ont guère de valeur émotionnelle.  Nous voulons toujours une « conclusion », une fin, nous voulons toujours arriver, dans notre processus mental, à une décision, à une finalité, un point final.  Cela nous donne un sentiment de satisfaction.  Notre conscience mentale n’est que mouvement en avant avec des étapes, tout comme nos phrases, et chaque point final est une borne qui marque nos « progrès » ou notre arrivée quelque part.  Pour ce qui est de la conscience, nous ne cessons d’avancer.  Mais, bien entendu, il n’y a aucun but.  La conscience est une fin en elle-même.  Nous nous torturons pour arriver quelque part, et quand nous y arrivons, c’est nulle part, car il n’y a nulle part où aller.

Tant que les hommes ont pensé le cœur ou le foie comme siège de la conscience, ils n’ont eu aucune idée de cet incessant mouvement en avant du processus de la pensée.  Pour eux, une pensée représentait l’accomplissement d’un éveil de la conscience sensible, une intensité cumulative dans laquelle la sensation se réalisait en conscience de la sensation jusqu’à la plénitude.  Une pensée accomplie était comme une sonde au plus profond d’un maelström, d’une certitude émotionnelle, et au tréfonds de ce maelström d’émotion, la solution se formait.  Mais il n’y avait pas d’étape dans le voyage.  Il n’y avait pas de chaîne logique à laquelle se cramponner. »

Lawrence, comme un point de repère pour re-sentir l’humain… Éminemment actuel.

Hugues Robaye

D. H. Lawrence, Croquis étrusques, Paris, Le bruit du temps, 2010, 288 p. 17×17 cm

D. H. Lawrence, Étreintes aux champs et autres nouvelles, Paris, Le bruit du temps, 2009, 350 p. 14×21 cm 

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David Herbert Lawrence

29052010

p52900070140cm.jpg Deux amis qui squattent la potterée, siège de l’association GE!

Kenneth White écrit que, quand il est dans sa bibliothèque, il se sent entouré d’amis. David Herbert Lawrence serait pour moi un ami très intime. Je l’ai beaucoup lu (et le relis). Il y a quelques années, j’ai commis un texte qui est resté dans mes tiroirs mais que quelques personnes ont aimé. C’est comme une intro à Lawrence, une visite guidée… 

Il s’agit aussi d’un service rendu…

Hugues Robaye

Le voici:  David Herbert Lawrence dans David Herbert Lawrence pdf d’où partait Lawrence.pdf




Yeung-Fun YUEN, l’enfance

1072009

Un Chinois élabore un court métrage sur son enfance. Il est en Belgique. Il pourrait retourner en Chine. Mais il préfère évoquer les lignes de force de l’enfance. Il commence par assister à des stages de chant choral pour des enfants de différents âges. Il s’assied dans un coin. Plus tard, il prend des photos. Des idées lui viennent : grandir, escalader, nager, surnager, les profondeurs cachées, la surface, le monde visible. Grandir.

Articuler ces images-idées…

Vous ne comprenez rien ? 

J’écris une note au sujet de l’élaboration du nouveau court métrage de YUEN. Bien sûr, je repense aux conceptions lawrenciennes de la compréhension. Qui s’étire, s’éprouve dans le temps, dans la durée. Images-idées en devenir. Comment comprendre ce qui a été et nous fait comme nous sommes, l’enfance ? Je discute périodiquement avec YUEN de son travail patient. Passionnant… Et, à suivre…

Hugues Robaye

yuenesquisse1.jpg   yuenesquisse2.jpg    yuenesquisse3.jpg

Canevas, début de story boards… À explorer




Un jeune homme né en 1920 : Jacques-Stéphane van Berchem

19062009

Comme quoi, sur le net, on peut écrire et lire des inexactitudes ! Oui Jacques-Stéphane van Berchem est né en 1920 et a donc plus que 84 ans… La rectification tire peu à conséquence heureusement (sauf peut-être pour notre ami !). Cette rectification est comme une illustration du travail de découverte d’un fonds littéraire au jour le jour dans une institution dévouée au patrimoine littéraire (comme le musée de la littérature où a été déposé ce fonds d’archives). Je ne connaissais rien de « Pour nous et nos amis » avant la visite de Jacques-Stéphane van Berchem (un peu hasardeuse puisqu’il avait d’abord proposé la collection de revues à la bibliothèque de l’ULB qui ne s’était pas montrée intéressée). Et avant-hier, je me mettais à lire, au fil des 76 numéros, les contributions du correspondant belge, ses extraits de « lettres ferroviaires » (voir ci-dessous).

 Et j’essayais de comprendre. Je rectifiais ma compréhension.

 J’essayais de comprendre ce qui faisait le caractère émouvant de ce phénomène littéraire : les lettres et, plus largement, cette revue de qualité, sans prétention, tapée à la machine (dactylographiée), tirée à peu d’exemplaire, envoyée à des amis, déposée dans quelques bibliothèques (en Allemagne, aussi) au gré d’un réseau d’amitiés. Et j’ai trouvé, ce matin, un document, inséré négligemment dans l’un des numéros qui explique l’esprit de la revue. Il est de Janine Le Fauconnier (voir ci-dessous).

 Et ces lettres dont j’essaie progressivement de cerner l’essence ? Familiarité, esprit, malice, variation des registres de langue, spontanéité, humour, complicité amicale : autant de traits qui caractérisent les « lettres ferroviaires » de JSVB. Curiosité minutieuse, goût de l’abandon, abandon à ces plages temporelles où le monde nous arrive  avec ses flux auxquels nous nous attachons et prenons plaisir (comme quand par exemple JSVB décrit en détails une araignée qui tisse sa toile pour finir par considérer ce mystère : comment a-t-elle pu tendre ce fil porteur de plus de 2,40, d’une résistance qui supporte tout l’édifice ?). Je songe au milieu très particulier qui a nourri cette curiosité d’antan, un rien encyclopédique, et, en fait, rigoureuse : une grande famille ancienne, aristocratique, érudite… Et puis un élément de compréhension, une cause qui fait un peu dériver : savoir que ces lettres ont été écrites presque toujours dans un train, en traversant l’Europe… Singulier…  Et ces moments savoureux d’observation gratuite nous parviennent par un autre hasard : par la volonté de la destinataire de ces lettres, Janine Le Fauconnier, d’en publier des fragments… L’exploration d’un fonds me rappelle toujours les propos de DH Lawrence sur l’exercice de la compréhension – propos qui imprègnent par ailleurs la démarche mayaque – le compréhension sensible qui procède par infinis paliers, où images, idées, impressions, intuitions en devenir, voire rêverie subliminale se mixent… Comment comprendre ?

Hugues Robaye

 

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Un texte de Janine Le Fauconnier paru dans  « 1, 2… 4 Auvergne » en novembre 1996.







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