Nos racines Lés arpes d’el drèfe

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vern3 noté2 Installation, métamorphoses et acteurs observateurs… Chapelle Notre-Dame de Grâce, Tournai

Jacques Tati disait qu’il faudrait intégrer aux programmes d’enseignement des heures d’observation…

Un jour Isabelle Tesse passe par la drève de Maire (Tournai) et remarque les croix peintes qui condamnent certains platanes de cette large avenue au trafic intense. Elle en parle à Jean-François Van Haelmeersch : ce serait bien de garder trace de ces arbres qui peuplent notre jardin intérieur ; des empreintes ?

Et Jean-François Van Haelmeersch de s’y mettre : des frottis sur papier, des photos retravaillées de traits, des empreintes sur tissus du tarmac avoisinant ; à partir des photos et des frottis, il abstrait des xylogravures…

Il en parle à Caroline Léger, si sensible au végétal, qui se met à travailler, elle, à montrer l’alpha et l’oméga de nos amis les arbres : photos de jeunes pousses sous un éclairage d’exposition, les racines vitales et fragiles reliées au feuillage dansant par une tige gracile où passe un filet de lumière tel une veine ; un fut fait de pages d’un livre ancien reposant sur un rouleau de papier suggérant un tronc avec ses cernes et ses années.

JFVH en parle à Bruno Delmotte qui compose une suite poétique en picard traduite en français et assortie d’explications philologiques éclairant les racines de la langue française quand elle remonte le temps en passant par le picard. Il compose une sorte de bestiaire de la drève de Maire (« maire » renvoie aux marées de l’Escaut qui avaient transformé ce lieu en marais, jadis) : bestiaire d’habitants, animaux et humains, vivant dans la beauté de cette allée qu’en automobilistes pressés nous oublions de regarder…

Nous composons un livre et j’ai bien envie de décrire ce beau et bon travail d’observation en commun, à plusieurs ; toutes les formes qu’il prend, que lui donnent ceux qui ont pris le temps : 5 artistes soucieux du vivant : un travail éthique…

Nos racines Lés arpes d’el drèfe, Bruno Delmotte, Caroline Léger, Hugues Robaye, Jean-François Van Haelmeersch, Phare Papier 2019, 10 euros

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Proposition mayaque : échange autour de notre relation à la Terre, le 28 septembre 2019 à 14h, à La Petite Maison de Muriel Adam, Walcourt ! Avec François Noul, Philippe Michaux, Marie Michaux et Clément Bernaert…

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À « La Petite Maison » de Walcourt, le 28 septembre, au cœur de la journée organisée par Muriel Adam consacrée à la Terre, une conversation réunira Clément Bernaert, Marie Michaux, Philippe Michaux & François Noul.

François Noul : assistant social, il dépose, au milieu des années 80, un projet à la Fondation Roi Baudouin, Pour une nouvelle dynamique des régions rurales ; obtient le prix et, dans la foulée, le directeur du CPAS où il travaille lui propose de reprendre une ferme à Marchienne au Pont. Il en fait un lieu de réinsertion pour jeunes en difficulté. La ferme Bocace pratique alors le maraîchage bio, l’élevage (poules, lapins, cochons), dispose d’une boucherie et distribue ses produits en circuit court.

François Noul est aussi écrivain ; sujets de prédilection : l’alimentation, les traditions rurales ; la vie de l’homme dans la nature. Livres et nombreux articles, notamment pour le Courrier de l’Escaut. C’est un visionnaire tranquille qui pense l’humain dans une forme d’autodétermination, d’autarcie, presque, s’il prend soin de son jardin et cuisine simplement et savoureusement… Je pense qu’écrire est en quelque sorte une thérapie. Je suis quelqu’un d’hypersensible, un rien me touche et l’écriture me permet d’exprimer mes émotions. 

Un autre visionnaire : Philippe Michaux. Il est maraîcher (« La Ferme du Printemps » à Nalinnes, un projet aussi éducatif, avec les journées « Vitalité ») et anime l’association : « Le chemin d’un village ». L’objet de celle-ci ?  Faire de la géographie humaine (à la Gaston Roupnel ou à la Élisée Reclus) autour du bassin de l’Eau d’Heure : montrer comment les peuplements successifs ont été en relation avec cet espace géographique que dynamise la rivière, le cours de l’eau… S’interroger sur le présent de ce peuplement, sur son avenir : comment y développer des activités en harmonie avec le lieu ?

Marie Michaux est l’une de ses filles : le 28, nous réfléchirons sur le monde d’aujourd’hui (en restant dans un « mécontentement joyeux » à la Krishnamurti) : il nous faut donc écouter les « jeunes » ! Marie a étudié l’horeca et suit de près les travaux de son père, en y participant.

Clément Bernaert termine ses études d’art dramatique à Mons, dans la classe de Frédéric Dussenne. Son travail de fin d’année porte sur l’histoire de deux orphelins – Léa et Théo – qui quittent leur institution urbaine pour s’installer à la campagne. Une nouvelle qui sera mise en scène. En fait, me disait-il, cette histoire porte d’abord sur la question de l’engagement : spirituel, amoureux, social, politique, écologique…

L’époque contemporaine est inquiétante, dominée par un consumérisme productiviste, grand ravageur de Nature et de psychologies humaines. Comment inventer un mode de vie plus harmonieux ? Une question complexe ! Arrière-plan de la rencontre du 28, à 14h :-)

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TARAANEH SABA au daf / un Iran de jeunes graphismes

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36 Tahereh Mohebi Taban blog  concert iranien 7 mai 2014 fb2

L’exposition « Le Lointain de Près, Un Iran de jeunes graphismes », à La Maison de la Culture de Tournai (avec MaYaK comme co-organisateur), le 7 mai passé : une soirée poésie musique avec FAEZEH AFCHARY-KORD, MARIE-CHRISTINE DEGRAEVE (Conservatoire de Tournai) & TARAANEH SABA, musicienne et professeure de musique iranienne.

Sur un poème de RÛMI qui accompagne une des affiches du catalogue : « Unity builds the future », de TABEREH MOHEBI TABAN

« Tu es ici pour unir

et non séparer »

écouter l’extrait




LE LOINTAIN DE PRES : UN IRAN DE JEUNES GRAPHISMES

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MaYaK/Phare Papier participe donc à l’organisation d’un mois iranien à Tournai, centré sur une exposition : 65 affiches de graphistes jeunes (et quelques-uns moins jeunes) qui illustrent la vie culturelle d’aujourd’hui dans ce grand pays méconnu. MaYaK/Phare Papier a conçu le catalogue. Non, le livre-catalogue! Car on peut considérer cette publication comme un MaYaK hors-série, vivant de l’intérieur, avec gravité, curiosité et humour.

 Un texte continu accompagne ces 65 images et forme une mosaïque de petits tableaux sur la vie des Iraniens. Par ailleurs, 20 affiches d’étudiants en graphisme de l’Académie des Beaux-Arts de Tournai entrent en dialogue avec ce lointain vu de plus près. Un Iran de jeunes graphismes pour dire qu’à partir de ces images naît un Iran, pas l‘Iran car un pays, une population sont tellement multiples. J’ai préféré « graphismes » à « graphistes » pour insister sur le côté impersonnel ou supra-personnel d’une création qui déborde toujours l’individu, sur le trait ou le geste du dessinateur qui, en Iran, est presque toujours calligraphe; sur la magie et la puissance incontrôlables des images qui font sentir, percevoir, connaître d’une manière si justement irrationnelle…

 Au fond, ce livre conçu en amitié avec Autour du Feu, l’atelier galerie de l’architecte et céramiste Faezeh Afchary-Kord, nous aimerions qu’il participe modestement au « rapprochement des peuples » (ça fait sourire), des sociétés civiles souvent oubliées par les sacro-saintes « actualités » et occultées par différents pouvoirs qui les utilisent plus qu’ils ne les servent.

 Entourés de ces 85 belles images vivantes, nous pourrons écouter de la musique, de la poésie, une conférence sur l’architecture… Voir le programme ci-joint ! Et puis, de retour de Cannes, le grand cinéaste Abbas Kiarostami passera deux jours à Tournai.

 Hugues Robaye

 

 




Le récit de la servante Zerline

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Vu samedi passé Le récit de la servante Zerline pour la seconde fois, aux Martyrs, avec Jacqueline Bir (la première fois, c’était en 1987 au National je crois, avec Jeanne Moreau). Bien sûr j’ai à nouveau été transporté par le texte, extrait du roman Les irresponsables d’Hermann Broch.
Kundera rend justice à Broch dans son essai « L’art du roman », voyant chez lui « peut-être le moins connu de tous les grands romanciers du 20e siècle ». L’injustice est qu’aujourd’hui Broch est toujours peu connu, hélas bien moins que Kundera par exemple.
Pour moi je n’aurais peut-être pas fait d’études de philo si je n’avais pas lu sa trilogie Les somnambules, et je préserve toute mon admiration pour un écrivain et un penseur extraordinaire.
Mais pour qui aime tout simplement le théâtre, l’interprétation intensément habitée de Jacqueline Bir vaut déjà qu’on aille voir la pièce.

Jusqu’au 25 janvier au théâtre des Martyrs

photo de Zvonock.




« Nourrir l’humanité, c’est un métier »: Cie Art & Tça (2)

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Démarche théâtrale pragmatique qui permet de poser un problème, qui suscite le débat et fait sentir le monde des agriculteurs par le dialogue, le témoignage émouvant, le film, le reportage, la poésie chantée, le jeu des corps incarnés. Par un jeu efficace de formes artistiques…

Une démarche de théâtre forum comme on le pratique en Afrique : mettre en scène le vécu des gens et les faire réagir. Poser les termes d’un problème ; dans ce cas, il semble presque irrésoluble : la politique agricole commune (« dont la reine d’Angleterre est la première bénéficiaire… »), les quotas qui endettent, les contrats avec les entreprises chimiques, le gel des prix des « produits agricoles », l’assistanat généralisé et dégradant qui en résulte, la nécessité pour l’ « exploitation agricole » de croître pour survivre, au détriment du voisin, le « concurrent », l’absence d’avenir (dans ce contexte, les enfants fuient la ferme…), le mépris pour le secteur « primaire », l’absence de soutien politique (3 % de la population, quantité électorale négligeable), l’endettement et encore l’endettement, la vente de la ferme, le suicide – le théâtre exprime cette complexité et arrête les gens, leur demande de réagir. Car ce soir-là notamment, un débat s’ensuit, avec la complicité du CNCD (Centre national de coopération au développement) qui a rendu possible, avec la commune de Saint-Josse, cette soirée gratuite… Et le public urbain participe, sans doute pas avec la même vivacité que celui des campagnes à qui le spectacle fut montré en premier – les agriculteurs se voyaient reconnus, entendus, valorisés par ce théâtre de la vie abrupte –, mais les questions fusent…

Le spectacle peut-il transformer la société, initier un autre équilibre social ? Très impressionné par le travail de ces deux jeunes comédiens, j’osais y croire et je me disais qu’il fallait que le GE ! s’active à faire tourner Nourrir l’humanité, c’est un métier, et réunisse à l’occasion de ces représentations des acteurs de changement, à Lessines, Ath, Tournai ? À suivre, en tout cas.

Hugues Robaye

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« Nourrir l’humanité, c’est un métier »: Cie Art & Tça (1)

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Les gradins du Théâtre de la Vie sont abrupts, chacun en conviendra. Luiza, Anouk et moi sommes assis au dernier rang, en hauteur. Il doit y avoir une soixantaine de spectateurs devant nous. Sur la scène, deux jeunes comédiens récemment sortis de la haute école d’acteurs de Liège jouent une « pièce » inhabituelle, résultat de tout un parcours, d’une longue enquête qui se poursuit encore, l’apprendré-je plus tard : ils sont allés à la rencontre du monde paysan des Ardennes, ont interrogé et filmé des agriculteurs, les ont suivis à Bruxelles au cours d’une manifestation mémorable qui aboutit aux portes du Berlaimont, ont fait des recherches (sur la PAC, notamment), ensuite écrit les paroles émouvantes que nous écoutons. Ils sont tous deux originaires de régions rurales : Ardenne et Sud de la France.

La vie est un théâtre ? Abrupte est la vie des cultivateurs. Insurmontable, pourrait-on croire. Charles Culot et Valérie Gimenez (art&tça) ont mis en scène des paroles de fermiers, se sont mis en scène eux-mêmes comme comédiens-chercheurs touchés par leur enquête et communiquant leurs découvertes et leurs sentiments ; les comédiens regardent avec nous deux séquences de leur reportage, projetées sur grand écran, et la comédienne fermière regarde avec nous la comédienne chercheuse traversant Bruxelles sur un tracteur et prenant des photos. Vertige des mises en abime… Leur expérience est encore mise en forme d’une autre manière : s’accompagnant à la guitare, Charles interprète une chanson militante qu’il a composée…

Décor : la traditionnelle table de ferme recouverte de la nappe plastifiée à carreaux… Le cœur de cette représentation : un jeune couple de fermiers raconte sa vie en conversant, les paroles de l’homme prolixe chevauchant souvent celles de la jeune femme taiseuse puis, la scène se fige quelques secondes en un tableau auquel succède un nouvel échange, un nouvel aspect du désarroi des agriculteurs. À la fin, quand la comédienne entre à nouveau dans le témoignage, elle se lève et face au public évoque la fin habituelle des rencontres avec leurs hôtes fermiers, elle évoque le silence qui suit quand il n’y a plus rien à dire… Silence alors de la comédienne qui dure, tandis qu’elle balaie du regard les spectateurs… Silence éternel…

Je vois tout cela du haut de ce gradin et je me dis qu’ici le théâtre devient la condensation d’une longue recherche où les comédiens se sont engagés et dont ils resteront marqués à tout jamais ; recherche en cours puisqu’ils continuent à enquêter dans le Sud de la France, à étudier les politiques agricoles, les directives du FMI aussi (comme me dira Charles), qu’ils veulent remodeler l’ensemble, lui adjoindre des parties poétiques. Pièce-vérité certes mais subtil artefact quand même : une articulation de perspectives différentes par rapport à la vie de ceux qui nous donnent à manger…  [à suivre]

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Villages en savane

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Villages en savane dans Afrique tournage-300x224 Le 22 janvier 2013, tournage de Villages en savane.

L’année passée, nous faisions un voyage au Burkina Faso. Un des objectifs : découvrir le Burkina endogène. Un livre suivra à ce sujet… Nous visitions un village, Bendogo, et imaginions des échanges avec les associations que nous rencontrions. Un peintre nous accompagnait, Ivo Moussa, qui faisait une douzaine de dessins rehaussés plus tard à l’aquarelle. Nous photographions. Le village était mis en images. Images intégrées à mon retour à des documents décrivant des projets d’échanges…

Cette année en janvier et février, retour à Bendogo. Nous allons plusieurs fois au village avec un double objectif: tourner un court-métrage avec une douzaine d’enfants du secondaire, en collaboration avec l’association ouagalaise, Caméra & consorts, François d’Assise Ouédraogo et Jupiter Moumouni Sodré. Les élèves n’avaient jamais utilisé d’appareils photos. Le stage se passe au mieux…

La dernière semaine de mon séjour, nous projetons le film devant plus de 200 habitants du village et des villages avoisinants. Il fait nuit, nous sommes dehors, davant la maison des jeunes; nous avons apporté un projecteur, un ordinateur, un écran cousu par Issouf, le tailleur de Nafissatou; un matériel d’amplification du son, un groupe électrogène. Nous sommes arrivés dans la camionnette du « Théâtre du Progrès », prêtée par son animateur, Zouli Ouédraogo. Les spectateurs sont touchés.

Deuxième objectif qui prendra plus de temps: éditer une brochure sur les richesses naturelles et culturelles de Bendogo.

Travail de valorisation, de conscientisation, prélude à d’autres échanges, notamment agroécologique (voir ci-dessous)…

Visionner \ »Villages en savane\ »

Hugues Robaye & Ramata Nafissatou Ouédraogo

tournage-2-300x224 dans Caméra & consorts Le 23 janvier 2013, Bendogo (Kadiogo).




Rimbaud au pays du porphyre, Éric Durnez

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ricdurnezetatelierfazyoctobre2011001reclr.jpg il nous arrive d’être sérieux au siège mayaque de la potterée: à gauche, chef mayaque, à droite Éric Durnez

Il nous faudrait plus de poètes mercenaires pour donner sens à nos vies. 

Ce vendredi 14 octobre, nous assistions Sylvie Cuvelier et moi à la lecture par Éric Durnez d’une version encore inachevée de sa pièce sur le monde des carriers de Lessines. On fête l’année prochaine les 150 des carrières de porphyre et de leur exploitation par les « cayoteux ». Le Centre culturel René Magritte (avec qui, en la personne de Myriam Mariaulle qui nous invitait ce vendredi, nous avons collaboré l’année passée dans le cadre du salon des livres de Tournai) a organisé dans ce cadre là une résidence d’auteur. Ainsi, armé de son porte-plume effilé (il s’agit de cet objet qui sert à écrire à la main et que l’on remplit d’encre), Éric Durnez est remonté à trois reprises de son Gers d’adoption pour travailler à ce projet. 

Se balader, prendre l’atmosphère des lieux, évaluer la demande des commanditaires, rencontrer les acteurs réels, les carriers, s’imprégner, lire ; laisser les images, les mots, les situations faire leur chemin… Le poète synthétise un monde. Poète ? Celui qui révèle des formes de vérité par la langue, par les mots qui lui viennent et qu’il ordonne un peu et rigoureusement ? 

De la poésie appliquée. Au monde de la carrière, de la pierre, du travail pénible mais aimé… Alors, si ça marche, les carriers comprennent mieux leur amour ! Je pensais à cela quand nous sommes arrivés avec Sylvie à la caserne des pompiers de Lessines où nous allions écouter Éric lire cette version en chantier. Je me demandais, comment il avait travaillé. Cela m’intéressait beaucoup de suivre et de comprendre son cheminement. Et ce qui en avait résulté. 

Nous avons donc d’abord entendu le résultat. Et je dois dire qu’il m’a assez soufflé. (Éric Durnez avait (notamment) lu le Louis Scutenaire (surréaliste belge) de Raoul Vaneigem (chez Seghers) et retenu le nom de Rimbaud que « le Scut » aimait tant. Rimbaud était passé par Bruxelles et Charleroi. Pourquoi pas par Lessines ? En creusant ce filon, le Gersois d’adoption découvrait que plus tard Rimbaud allait gérer une carrière à Chypre…). 

La pièce que nous écoutions mettait en scène un jeune poète de 17 ans et de passage(s), voulant assister à une explosion de porphyre (de celles qui inspireront plus tard Magritte pour ses rochers suspendus dans les airs et qui pouvaient symboliser aux yeux du poète de 17 ans (revisité par Durnez), et à ses sens de jeune anarchiste, la destruction pour mieux reconstruire). La pièce avait aussi pour personnages sa logeuse, une jeune paysanne herboriste (le pays des collines, c’est en effet le pays des herbes sauvages magiques), veuve prématurée d’un paysan devenu carrier, et l’ « Ancien », le carrier qui a pénétré les mystères de la pierre, du sous-sol, approché celui du chaos des origines… Oulala, mon dieu (MaYaK tout-puissant), cela aurait pu être bien lourd… Mais en fait ce n’est que ma présentation, mal équarrie (tel un éclat de porphyre négligé), qui l’est… 

Car en fait, à l’audition, je constatais que toute cette matière éclairante, tactile, symbolique, mythique se distillait subtilement en courtes saynètes de dialogues entre le jeune homme fragile et exalté et la jeune fille qui se méfiait de ce « poète » et entre l’idéaliste révolutionnaire (ce même Rimbaud) et l’Ancien qui exprimait la noblesse mystérieuse et concrète de son travail… Alternance de point de vue sur les carrières et le travail des carriers. Échanges entre les personnages, qui s’approfondissaient de saynète en saynète. Des personnages qui se transformaient mutuellement par petits apports (langagiers). Méfiances par rapport à la langue du poète de qui la jeune fille et l’Ancien reconnaissaient pourtant la sensibilité à ce milieu qu’il cherchait à connaître. 

C’est évidemment jubilatoire (et périlleux) pour un écrivain de se mettre à la place de Rimbaud. Éric Durnez a procédé à de discrets collages d’expressions rimbaldiennes glanées notamment dans la correspondance du poète voyant. Correspondance, parlons-en : dans cette version de la pièce, les courtes saynètes de dialogue sont ponctuées de lettres où Rimbaud se lâche – nouvelle perspective, ou forme de langue, sur les carrières – et qu’il envoie à Bruxelles à un certain Verlaine (un poète, semble-t-il). 

Éric Durnez incarne donc Rimbaud avec une sobriété profonde mais aussi avec un humour discret (vous entendrez et verrez). En définitive, je trouvais très émouvante la manière dont il est parvenu à exprimer la fragilité de ce génial hypersensible face à une femme de
la Nature ( !), qui bien sûr le séduit, et à un homme d’expérience (qui, de plus en plus confiant, se livre progressivement à lui)… 

Tout ce travail de mise en forme au service d’une activité industrielle qui marque encore le Lessines d’aujourd’hui. 

Oui, engageons encore des poètes et qu’ils nous montrent mieux le monde dans lequel nous essayons de vivre ! 

Éric Durnez est venu hier à la potterée, siège mayaque. Je l’ai interrogé sur sa démarche et vous entendrez bientôt des extraits de cette conversation. La pièce sera créée à Lessines en juin prochain (Jean-Claude Drouot incarnera l’Ancien). Nous ne manquerons pas de vous avertir ! 

Hugues

 

 ricdurnezetatelierfazyoctobre2011004lr.jpg La pièce se termine bien




Daniel Adam : Une histoire tue

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Une histoire tue de Daniel Adam. Roman envoyé par les éditions du Cerisier (dont nous avions déjà évoqué deux titres : Journal de l’antenne rouge de Jacques Dapoz et L’apoptose de Gérard de Sélys). 

Le livre de Daniel Adam a la même efficacité que celui de Gérard de Sélys. Efficacité narrative : 42 chapitres courts où un narrateur à la première personne, Charles, se raconte au jour le jour en intégrant constamment des souvenirs d’enfance. Le lecteur reconstitue son puzzle familial au gré des détails qu’il ranime en résonance avec son présent (d’autant qu’il vit toujours dans sa maison d’enfance).  Jadis sa sœur est partie (et toute la famille s’est disloquée) ; aujourd’hui sa femme est le plus souvent absente… Une voix introspective, émouvante, d’un humour et d’une autodérision mélancolique, parle au lecteur et le tient en haleine, car, suspens, jusqu’à la dernière page je vous l’assure, se forme l’histoire familiale – non dite et qui tue… 

Il y a sans doute une autre raison pour que MaYaK – le Phare – parle de ce livre. Daniel Adam est l’un des fondateurs de « La Compagnie Maritime », compagnie de théâtre action qui « vogue à contre-courant des idées bateaux et des pensées sous-marines, préfère la course autour du monde en solidaire aux croisières mondaines » et… Pour en savoir plus sur ces « déformateurs d’adultes », naviguez donc sur leur beau site amarré ci-dessous à droite… 

Daniel ADAM, Une histoire tue, Cuesmes, Le Cerisier (Faits et Gestes), 2010. 157 pages, 9,80 euros

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