Un tueur de 86 ans : « La seconde vie d’Abram Potz » de Foulek Ringelheim, au théâtre du Méridien

18062009

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Un vieillard de 86 ans, Abram Potz, devient tueur en série par haine de la jeunesse et dans l’espoir de décrocher un procès aux Assises, de pouvoir ainsi dénoncer en public l’hypocrisie et l’injustice de nos sociétés à l’égard des vieillards. Potz est psychiatre psychanalyste et juif ; il a perdu ses parents à Auschwitz (détails contextuels importants qui imprègnent sa vision pénétrante et sans concession) et raconte avec un cynisme désabusé sa déchéance, ses brimades quotidiennes et la stratégie de ses crimes… Voilà plus ou moins ce que l’on trouve dans le roman à l’écriture serrée de l’écrivain belge Foulek Ringelheim (qui fut magistrat).

Sur les planches, cela donne un monologue d’une heure vingt admirablement porté par le comédien Freddy Sicx, qui joue de tous les registres pour raconter au jour le jour le mépris pour les vieux (que Potz rend bien aux jeunes…).

Une scénographie épurée : un banc (qui reprend les dessins des palissades aux planches verticales mais aussi de biais qui ferment la scène. Un éclairage arrière qui permet de dédoubler l’espace et de projeter sur la scène des jeux de lumières et d’ombres entrecroisées (filtres de couleurs pour atmosphères variables)… Bruitages d’ambiance atténués derrière les palissades (qui ouvrent également l’espace, comme les lumières) ; musiques depuis l’avant-plan. Projection de formes sur les panneaux : le monologue du comédien nous transporte en différents lieux qui sont ainsi évoqués discrètement et efficacement. Un dispositif scénique qui accompagne avec beaucoup de finesse un monologue qui tourne souvent à la farce cruelle, tout en faisant réfléchir…

J’avais lu le roman et j’ai constaté un travail d’adaptation en mosaïque en début de pièce, qui se stabilisait après en une série de tableaux : l’ascenseur, le voyage organisé, le restaurant, l’appartement etc. pour terminer en queue de poisson : le vieillard n’aura pas son procès ; il sombre dans l’alzheimer : la tension cynique du personnage se dégonfle pathétiquement en fin de spectacle.

Très belle réussite, je trouve, que la mise en scène (et l’adaptation du texte avec Foulek Ringelheim) par Catherine Brutout.

C’est au Théâtre du Méridien, à Boitsfort (Bruxelles), jusque samedi seulement, ne ratez pas la pièce. Et ce théâtre est un lieu fort élégant, bien fréquenté…, traversé par un chien des plus sympathiques qui tient autant du thibétain que du rasta (à voir avant le spectacle)… Des jardins en gradins sur les contreforts de la forêt de Soignes, un foyer accueillant où l’on mange bien, des œuvres d’art, sculpture, peintures, photos, en dialogue avec les spectacles, bref de quoi combler un exigeant hédoniste mayaque !).

www.theatredumeridien.be 02/6633211

Hugues Robaye




Versus

14052009

Vendredi passé j’assistai, au théâtre Marni à Ixelles, au spectacle Versus du comédien Frederik Haùgness, accompagné par quatre musiciens de jazz. Le trompettiste me fit forte impression: précision et élégance du phrasé, sonorité rouge et or m’évoquaient le Miles Davis du début des années 50. La musique se jouait en contrepoint de l’histoire racontée par le comédien: la découverte de son père assassiné, ses propres interrogations sur la justice et la vengeance. Où sont convoqués le jazz, que son père aimait, et Hamlet, qui est aussi le nom du village natal de John Coltrane.  Une histoire dont on ne pouvait douter qu’elle fût vraie.

J’avoue avoir été troublé par cette mise en scène de vies privées. Qui pourtant se rencontre de plus en plus: pour ne prendre encore qu’un exemple, la jeune chanteuse, comédienne elle aussi, Stéphanie Blanchoud,  interprète en public une chanson, Ressemblance, où elle s’adresse à sa mère.

Il semble donc qu’une vie intime, aujourd’hui, puisse désirer un public, au lieu de s’en protéger. Certes, il y a une tradition littéraire de l’intime. Mais le dévoilement y reste médiat, alors qu’ici on voit une présence, une exposition publiques nues.

Qui sont mues par des ressorts très divers. Pour Versus ou Ressemblance, peut-être pourrait-on rajouter celui-ci: l’envie courageuse d’affirmer une  authenticité dans une sphère publique gangrenée par l’omniprésente marchandise et ses simulacres. Mais il  faudrait interroger les auteurs…

Hugues me dit que le thème des MaYak 5/6 devrait être « solitudes en société ». L’occasion de revenir sur cette mutation.

http://www.youtube.com/watch?v=HDyRW1mFIOw

http://www.dailymotion.com/video/x8pga6_stephanie-blanchoud-live-50-nord-re_music

Xavier Vanandruel

 







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